La soute est pleine

 

J’aime plutôt les aéroports. Promesse d’ailleurs (où l’herbe est toujours plus verte), d’horizons lointains et exotiques, de dépaysements bon enfant, de rendez-vous en terre inconnue. La réalité est beaucoup plus terre-à-terre. Les voyageurs ont rarement l’allure de mignons photographes pour National Geographic.
On y côtoie finalement tout et n’importe quoi. Il y a celui qui, au départ de Paris en plein hiver, porte des tongs parce qu’il pense déjà à sa destination tropicale, celui qui est emmitouflé dans une doudoune dont il ne sera bientôt plus quoi faire à Koh Phi Phi où il se fera dorer le croupion, celui qui dort sur la moquette, celui qui dort sur trois sièges (n’est-il pas le plus énervant ?), celui qui court, celui qui refait tout son bar au duty free, celui qui achète ses cadeaux souvenirs à la dernière minute, celui qu’on appelle quatorze fois au micro, celui qui ne part jamais sans son coussin tour de cou et que je considérais comme inapte à s’adapter au changement – quelqu’un manquant de souplesse en somme. Mais ça, c’était avant. Quand on vole loin, longtemps, de nuit, ce petit objet légèrement ridicule est béni des dieux.
Et il y a celui qui espère avoir le dernier chariot – c’est mal connaître mes enfants…
Enfin il y a nous, les professionnels de l’avion. Parcourant des milliers de kilomètres par an, habitués aux sièges étriqués, à partager un accoudoir pour deux, à voyager léger, à manger le nez dans le dossier du siège de devant. Que nenni ! On le sait, que l’homme ne tire aucune leçon du passé. Ce retour de Noël, nous avions donc des dizaines de petit trucs pendant au bout des doigts (rien qui n’aille en soute évidemment), des valises qui ont presque rendu leur dernier zip à force d’être ouverte puis refermée pour être ensuite violemment pesée. Cette corvée m’obligea à monter sur la balance, ce qui me mit d’humeur chagrine. Mon régime foie gras-fondue savoyarde-escargots-fromages-Dragibus-Carambar aura eu raison de moi. J’ai vraiment un mauvais métabolisme. Comme à chaque fois, nous avons tenté d’identifier ce que le plateau-repas avait à offrir (visiblement, pas une once de gratitude), fait tomber l’avatar de Vache qui rit sur notre pantalon, arrosé notre chemise de jus de pomme, et mangé le yaourt à la fourchette vu que la cuillère, tombée à nos pieds, était impossible à récupérer. C’est donc naturellement à ce moment-là que l’un de mes enfants (celui qui était au milieu dans la rangée de quatre) m’annonça que s’il n’allait pas dans la seconde aux toilettes il urinerait sur le velours bleu de Lufthansa. À ce moment, je repensai à la respiration au yoga, mais pratiquement j’eus surtout envie de me téléporter en business class, seule face à Leo di Caprio dans Le loup de Wall Street, sirotant une coupe de n’importe quoi comportant de l’alcool.
Tout cela est le prix à payer pour revoir ceux qui sont chers à nos coeurs et manger de la baguette fraîche. Cela vaut bien un petit sacrifice.
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6 réflexions sur “La soute est pleine

  1. sandrine rais dit :

    mdr !

  2. Mamounette dit :

    J’adore !!!

  3. Milie dit :

    Promis, la prochaine fois c’est nous qui venons 😬😘

  4. Lassalle dit :

    C’est bon de se dire que nous ne sommes pas seul à partager tous ces bons moments 🤣

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